Le précédent film d'Elia Kazan, Splendor in the Grass, puise sa force dans une sublime fragilité, un fil tendu qui menace de craquer à tout instant mais qui tient du début à la fin, mystérieusement (magnifiquement). Dans America, America, le fil craque. Il craque même plusieurs fois ; il ne cesse de craquer. Ce n'est pas un film fragile, c'est un film fracturé, déchiré de l'intérieur par la tension irréconciliable entre la grandeur du sujet et la sensibilité tranchante et solitaire de Kazan. Mais de cette fracture naît quand même une certaine beauté, moins pure et moins évidente que celle de Splendor in the Grass. Une beauté sèche, vive, primitive, qui surgit par instants seulement, au gré d'un plan, d'un geste, d'un regard (d'une musique, aussi), avant de repartir aussi sec, emportée par le craquèlement du film. Film fracturé mais qui tient quand même, sur une jambe, tombant puis se relevant. Le cinéma instinctif de Kazan a quelque chose de si violent qu'il en devient parfois destructeur, mais la destruction s'accompagne ici d'une profonde sincérité qui s'exprime d'un même geste. D'où la tentation du cri, de l'hystérie. D'où cet amour de Duras pour Kazan, sans doute. Deux cinéastes passionnels qui, parce que leur passion n'a pas de pays, tentent de l'inscrire dans le temps (ellipses folles de Splendor in the Grass).
samedi 28 avril 2018
America, America - Elia Kazan
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