mercredi 29 janvier 2020

J’adore le mot grève. Pour sa sonorité. J’aime aussi que sa première définition soit « terrain uni et sablonneux le long de la mer ou d’une grande rivière » (Littré). Il y a une poésie de la grève, d’un calme mouvementé, qui n’a rien à voir avec l’image bruyante et stagnante qui bien souvent lui est attribuée. On se trompe lourdement sur la grève si on y voit un arrêt ; elle est plutôt une somnolence -même pas une pause-, elle est le geste même de mise en sommeil. Et dans le monde dans lequel on vit, endormi dans un flux d’activités fantômes, illusoires, il y a quelque chose de révolutionnaire dans l’action de la grève : dormir devient un acte qui à lui seul, dans sa concrétude d’acte (son actualité), repousse momentanément la charge oppressante des fantômes. Le gréviste prend la responsabilité de son propre sommeil. Alors l’État, cet affreux marchand de sable, est empêché dans le commerce indigne de son autorité.

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